Extrait de : «Historique des chaires de Chimie, de Physique végétale et de Physiologie végétale du Muséum d'Histoire naturelle

Extrait de : «Historique des chaires de Chimie, de Physique végétale et de Physiologie végétale du Muséum d'Histoire naturelle», Victor Plouvier*, Bull. Mus. natn. Hist. nat., Paris, 4e sér., 3, 1981, Miscellanea : 93-155.

 


Plus d'information! Index Bibliographie

 

Origine et évolution des deux chaires de chimie et de physique végétale

 

Leurs principales découvertes

 

En chimie organique

 

 

De rares travaux du temps du Jardin du Roy retiennent notre attention : S. Boulduc fut le premier à utiliser des solvants pour préparer des extraits végétaux: H.M.Rouelle isola en 1773 la "substance particulièrement riche en azote de l'urine" et qu'il appela "extrait savonneux de l'urine".

Fourcroy et Vauquelin firent de remarquables analyses de substances d'origine animale et végétale ; ils obtinrent l'urée à l'état pur à partir de son nitrate. Vauquelin découvrit, l'allantoïne (1799), l'asparagine (1805), il fut le premier à signaler la nicotine dans le tabac, il retrouva l'acide quinique déjà découvert par Hofmann.

Il fallut attendre Chevreul pour voir progresser vraiment la chimie organique. Avant lui, on se bornait à séparer les matières extractives, astringentes, sucrées, azotées, les huiles fixes ou volatiles... Il précisa la notion d'espèce chimique (corps pur). Il montra l'existence, dans les produits des êtres vivants, d'espèces qui sont chacune "une collection d'êtres identiques par leur nature, la proportion et I'arrangement de leurs éléments" ; il les nomma principes immédiats. Avec ces notions directrices, il fit sur les corps gras un admirable ensemble de recherches, de 1813 à 1823. Les corps gras ne sont pas des corps purs et donnent par saponification des acides gras et de la glycérine. Cela permit la découverte des principaux acides gras : stéarique, margarique (palmitique), oléique, butyrique, phocénique (valérianique). Les applications industrielles furent nombreuses : fabrication des bougies stéariques, des savons, production de la glycérine...

Chevreul fit ensuite quarante ans de recherches sur les teintures : action des agents physiques sur les étoffes teintes, rôle des mordants et des apprêts sur la solidité des couleurs, affinité capillaire, contraste simultané des couleurs. Il obtint le cholestérol (déjà entrevu par Fourcroy), la lutéoline, le quercitrin... Son préparateur Cahours découvrit l'alcool amylique dans l'huile de pommes de terre (1839). Cloëz prépara la cyanamide, les bases éthyléniques (1853), les cyanates alcooliques et isola l'eucalyptol (1870) : l'honneur de son travail sur les bases éthyléniques lui fut ravi par Hofmann qui sut discerner leur véritable nature d'ammoniaques polyatomiques et exploiter fructueusement cette mine féconde.

Frémy s'est occupé de sujets très variés en chimie organique : découverte de la fermentation lactique, analyses de produits animaux et végétaux, matières cellulosiques et pectiques.

L'étude des quinquinas a permis à Arnaud de découvrir un nouvel alcaloïde, la cinchonamine (1883), remarquable par l'insolubilité de son nitrate. L'étude des poisons à flèches de quelques Apocynacées l'a conduit à isoler de l'Acokanthera ouabaia un glucoside nouveau, l'ouabaïne (1888), poison cardiaque redoutable, maintenant très utilisé en thérapeutique. Arnaud donna la vraie formule de la digitaline et également celle du carotène, qui était alors le seul hydrocarbure coloré connu. A l'époque où G. Bertrand travaillait dans son laboratoire, il découvrit l'acide taririque dans la graine de Tariri du Guatemala (1892), premier composé acétylénique rencontré chez les végétaux.

Maquenne fit sur les sucres et glucides quelques travaux d'un grand intérêt : constitution de l'inosite, premier sucre à chaîne fermée (1887) ; synthèse de l'inosite racémique par combinaison des D et L - inosites, première isomérie optique constatée chez les sucres (avec Tanret, 1890) ; découverte de la perséite, premier sucre à 7 atomes de carbone : formule du tréhalose.

De 1890 à 1900, G. Bertrand se rendit célèbre par une importante production scientifique : préparation biochimique du sorbose à partir du sorbitol, laccase de l'arbre à laque, ferments oxydants chez les végétaux, fermentation poétique, vaccins et sérums anti venimeux (avec C. Phisalix).

Hasenfratz fit de patientes études sur la harmine et la harmaline, alcaloïdes du Peganum harmala. Il s'intéressa aux lactones des sucres, à l'acide taririque, au l'anghinia venenifera.

Les nombreux travaux de Simon sont étrangers à la chimie végétale. Ils portent sur les acides alpha-cétoniques, l'acide pyruvique en particulier, le mécanisme de synthèse de cycles azotés, les uréides, l'oxydation sulfochromique, la viscosité en rapport avec la neutralisation. Simon fut l'un des premiers à pressentir le rôle fondamental des acides alpha-cétoniques en biochimie.

Frèrejacque a préparé le camphre sulfonate de méthyle (1926) qui a conduit à l'obtention du solucamphre. A partir de 1941, il se consacra à la recherche des hétérosides digitaliques, notamment chez les Apocynacées (Tanghinia, Thevesia, Cerbera, Adenium, Cerberiopsis) ; il isola des hétérosides, aglycones et sucres nouveaux dont il donna la structure et fut avec Reichstein l'un des rares spécialistes mondiaux dans ce domaine.

L'œuvre de Fosse, très homogène, a pour origine sa découverte en 1907 de la combinaison du xanthydrol et de l'urée. Après la mise au point de sa méthode spécifique de dosage de l'urée, il montra la présence d'urée dans les Invertébrés, les végétaux et le sol. Avec ses collaborateurs, Brunel, de Graeve, Thomas, il étendit ses recherches à l'allantoïne, l'acide allantoïque et l'acide urique (1929-1936). La présence de ces substances chez les êtres vivants et des enzymes qui les transforment les unes dans les autres sont des acquisitions d'un grand intérêt ; en outre, l'allantoïne a été dédoublée en ses constituants optiquement actifs. Fosse a présenté une théorie de l'uréogenèse : l'urée des végétaux serait un terme intermédiaire de la transformation de l'azote des nucléoprotéines, le terme final étant l'ammoniaque.

Bridel s'était proposé de dresser l'inventaire des principes immédiats, sucres et glucides existant dans les végétaux, puis de faire l'étude corrélative des ferments spécifiques de ces composés. Il découvrit treize glucosides nouveaux, s'intéressa aux hydrolyses enzymatiques et à l'action synthétisante de l'émulsine. Une dizaine de thèses dirigées par lui portent sur ces sujets. Son collaborateur Charaux découvrit le rutinose et la rhamnodiastase et fut un pionnier dans le domaine des flavonoïdes.

Après Bridel, des recherches analogues lurent poursuivies dans son laboratoire. Rabaté étudia les Salicacées, A.Sosa obtint de nombreux composés nouveaux à partir de plantes diverses. Plouvier isola des polyalcools ou cyclitols et des hétérosides de très nombreuses Phanérogames dans un but taxinomique. Le Muséum a été l'un des premiers établissements qui se sont occupés de la recherche des glucides chez les végétaux : on sait que cette science a suscité partout d'innombrables travaux au cours des dernières décennies.

Sannié a entrepris une nouvelle synthèse totale du système tétracyclique des stérols (avec Panouse). Il a isolé du petit-houx la ruscogénine, nouvelle sapogénine stérolique qui devait lui servir pour accéder aux hormones stéroïdes (avec Lapin).

Mentzer obtint des antivitamines par modification de structure de certaines vitamines K. Sa méthode de condensation thermique qui consiste à chauffer un phénol avec un ester malonique a permis la synthèse d'hétérocycles oxygénés : flavones, xanthones, roténoïdes... De nombreuses thèses dirigées par lui ont porté sur ces sujets. Dans la même voie, D. Molho a étudié les relations entre l'analogie structurale et l'activité biologique chez les antivitamines, antibiotiques...

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